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dimanche 2 août 2015

Adolescentes en détresse

Chez les jeunes femmes de moins de 18 ans, l'IVG est l'issue de plus d'une grossesse sur deux : 6 000 mineures décident ainsi chaque année d'avorter. Chez les ados, les grossesses non désirées sont le fait d'accidents de contraception, d'une contraception hasardeuse ou de pas de contraception du tout.
femme
"Lorsque j'ai appris que j'étais enceinte, l'idée de le garder ne m'est pas venue à l'esprit". Sophie, 18 ans et lycéenne à Paris est certaine d'avoir fait le bon choix, il y a tout juste un an : "Garder un enfant quand tu as 17 ans, c'est décider de l'élever seule ou de faire ta vie avec un amour de jeunesse. Je ne pouvais envisager ni l'une ni l'autre des solutions. L'adolescence, ça ne se vit pas avec un bébé dans les bras, mais avec des amoureux, des potes et le droit à l'irresponsabilité. J'ai très envie d'un enfant, mais je ne veux pas le faire à la légère."

"Ca ne peut pas m'arriver à moi"

Les adolescents connaissent les différents moyens de se protéger mais pensent que le risque, c'est pour les autres : "Avant, je pensais, comme toutes mes copines que ça ne pouvait pas m'arriver", se souvient Sophie qui reconnaît avoir encore des relations sexuelles non protégées : "La dernière fois, j'ai tout de suite pris la pilule du lendemain…". Un projet contraceptif sérieux est de plus difficilement compatible avec "le comportement adolescent fait de conduites d'essai et de risques"*.

La sexualité des ados, un tabou

Les relations que Sophie entretient avec sa mère lui ont permis de ne pas être seule face à cette grossesse non désirée et à la décision d'y mettre un terme. "Elle a été avec moi tout au long de cette histoire : quand j'ai fait le test, pendant l'entretien préalable… Je sais maintenant que j'ai eu une chance inouïe". L'absence de dialogue avec leurs parents plonge de très nombreuses jeunes filles dans une détresse profonde. Cette peur d'affronter le regard des adultes est d'ailleurs l'une des principales raisons de la reconnaissance tardive de ces grossesses et, dans les cas les plus graves, du dépassement des délais légaux de l'IVG : "Pour une jeune fille dire, "je suis enceinte" c'est en fait dire " j'ai couché". Lorsque les relations amoureuses n'ont jamais été abordées à la maison, c'est une honte parfois insurmontable", explique Martine Leroy, du Planning familial de Nantes. "Bien que le sexe soit présent partout dans notre société de consommation, la sexualité des jeunes, elle, est un sujet tabou, y compris, je dirais même surtout dans les familles, toutes classes sociales confondues. Les grossesses chez les mineures sont très souvent perçues par les parents comme une atteinte à l'intégrité familiale". Ce sont les copines qui, en général, recueillent les confidences : "Comme elles savent que j'ai de l'expérience, mes copines et ma cousine viennent me voir dès qu'elles ont un retard de règles ou quand elles ont fait l'amour sans rien. Chez elles, elles sont seules face à ces problèmes".

Priorité à la prévention

Dans ce contexte, la levée de l'autorisation parentale demandée depuis des années par de nombreux médecins, associations ou syndicats, et prévue dans la nouvelle loi sur l'IVG, facilitera le parcours de centaines de jeunes filles.
Mais l'essentiel reste, pour les acteurs de terrain, l'information et la prévention, dans et hors le milieu scolaire : "L'information trop rare et trop théorique est reçue par les adolescents, mais ils ne savent pas comment l'utiliser dans leur vie quotidienne, pour leur propre corps. Ce décalage est souvent à l'origine des grossesses non désirées. Il faudrait mettre sur pied des groupes de paroles où les ados pourraient échanger sur des expériences concrètes", conclut Martine Leroy.
Quand on demande à Sophie si son IVG lui a laissé des séquelles, sur le plan psychologique ou affectif, elle dit : "Je ne regrette pas, mais il y a une chose que j'aurai aimé savoir : si mon bébé aurait été une fille ou un garçon…"

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